30/09/2005
COMMENT METTRE A GENOUX LA FRANCAISE DES JEUX ?
On pourrait croire que de tous les jeux d'argent que les hommes ont inventés depuis que l'argent existe, ceux qui dépendent uniquement du hasard sont les plus imprévisibles.
Or, c'est exactement le contraire ; si les parties de poker, les paris basés sur les résultats des courses de chevaux ou des matches de boxe sont soumis à des lois dont la modélisation mathématique est impossible à établir (état du terrain, forme des participants, vitesse du vent et âge du capitaine) en revanche les jeux où seule la chance intervient sont régis par les règles absolument rigoureuses de cette branche bizarre des mathématiques : les probabilités.
Bien sûr elles ne peuvent prévoir de quel côté va retomber une pièce après un seul lancé (dans ce cas précis elles nous avouent plutôt leur doute complet puisqu'elles évaluent les forces respectives du « pile » et du « face » à 50-50), mais elles nous donnent avec une précision ABSOLUE, avec autant de chiffres après la virgule que vous le souhaitez quelles sont les CHANCES pour qu'un événement dépendant uniquement du hasard, et dont on connaît les règles de causalité, puisse se produire.
C'est ce mélange de rigueur infinie et d'incertitude totale qui font des « probas » un secteur à part de la reine des sciences, la science mathématique. La théorie y est toujours parfaite, la mise en pratique ne l'est jamais !
Pour les jeux d'argent, il est une donnée fondamentale qui permet au joueur de déterminer l'intérêt qu'il peut retirer du jeu ; c'est l'espérance mathématique, i.e. la somme des gains possibles multipliés par leurs probabilités respectives. Si cette variable est supérieure à la mise fournie, le jeu est « rentable », sinon il ne l'est pas ; ce qui est presque toujours le cas. Par exemple un « pile ou face » qui rapporte plus de 2 fois la mise, ou un jeté de dé qui promet au gagnant plus de 6 fois son gage sont avantageux. Et inversement.
Tous les jeux de hasard auxquels on peut s'adonner (casino, machines à sous, loto) sont évidemment à l'avantage de la banque ; sinon, ils n'existeraient pas.
Ils offrent au parieur une espérance mathématique toujours plus ou moins inférieure à la mise. Par exemple 1 euro risqué sur un des 37 numéros d'une table de roulette française (1 chance sur 37 de gagner 36 fois la mise) ne rapporte en moyenne que 36/37 euros, c'est à dire 0,972972... euros. La différence, les 3 centimes (environ), est empochée par l'établissement.
Les seuls jeux équitables sont du type « poker » où tout l'argent des joueurs est intégralement redistribué après la sortie du tripot dans les poches des participants. (Le poker n'est, il est vrai, pas un jeu de hasard car une fois la distribution faite le joueur prend l'initiative. Pour l'exemple imaginons une bataille payante dont on aurait intéressé la partie.)
Si vous passez une soirée au casino, vous savez que vous jouez contre plus fort que vous ; et qu'en finale, c'est la banque qui gagnera. Il n'est que de voir la richesse qui suinte des buildings de Las Vegas ou de se rappeler que les citoyens monégasques sont exemptés d'impôts pour s'en convaincre. Et de réaliser qu'avec 2,702702702 % (environ) des sommes investies par les joueurs, on peut faire de belles choses !
Il n'y a pas que des perdants au casino, il y a aussi les gagnants d'un soir. En quelques heures sur un tapis vert on peut gagner des sommes énormes, ou en perdre, avec une probabilité très légèrement supérieure, d'aussi énormes.
Roulette, chemin de fer, black jack procurent grosso-modo la même rentabilité : quelques pourcents des mises engagées pour la banque ; des « cacahuètes » sur chaque coup qui deviennent des trésors sur le long terme quand le total des mises devient conséquent.
Si on s'amuse à chercher, parmi tous les tenanciers de tripot, quel est le plus malhonnête, il en est un qui remporte la mise !
C'est, on l'applaudit bien fort ! La française des jeux.
Effectivement, la rentabilité de ses jeux est particulièrement minable. Parmi ceux-ci, il en est un qui présente l'avantage, outre celui d'être l'un des plus pernicieux inventés par l'état pour soutirer aux classes pauvres et moyennes un coquet impôt volontaire, d'offrir aux matheux en herbe un exercice pratique pour exercer leurs connaissances en matière de probas.
C'est, on l'applaudit bien fort ! Le rapido.
En effet, contrairement au loto, au PMU, qui distribuent des gains variables et nécessitent, pour en analyser le mécanisme, de posséder des informations confidentielles ou d'effectuer des calculs compliqués, le rapido offre à tous ses participants l'indication sur ses bulletins du montant des gains affectés à chaque événement. 10 000 fois la mise dans le meilleur des cas. Lien :
http://www.inrialpes.fr/sel/articles/rapido/rapido.html
Pour mémoire la première grille comprend 20 numéros parmi lesquels on doit en choisir 8 ; et la deuxième 4 numéros dont on doit sélectionner l'un d'entre eux.
Les chances de gagner au premier rang (8 bons numéros dans la première grille et le bon choix dans la deuxième) sont assez faciles à calculer :
Pour les non-matheux, rendez-vous au tas de sable quelques lignes plus bas. Pour les autres :
8 sur 20 multiplié par 7 sur 19 multiplié par 6 sur 18…etc multiplié par 1 sur 13 pour la grille A, et 1 sur 4 pour la B
i.e. :
(8 X 7 X 6 X 5 X 4 X 3 X 2 X 1 / 20 X 19 X 18 X 17 X 16 X 15 X 14 X 13) / 4 = (40320 / 5079110400) / 4
à peu près 1,984599507819322060808128919584 X 10 -6
c'est à dire une chance sur 503880
pour le deuxième rang (même chose sauf qu'on a loupé le bon numéro dans la deuxième grille, c'est trop bête !) la chance, si on peut l'appeler ainsi ! est 3 fois plus grande.
Après, ça se complique. Pour obtenir 7 numéros dans la première grille ça donne :
7 sur 20 multiplié par (6 sur 19 multiplié par… euh ! … Où ai-je pu bien mettre mon bouquin de maths de première ? Attendez-moi cinq minutes je vais fouiller dans le grenier. Tup tup tup Gnihiiii ! fouille fouille fouille. Gnihiiii ! Tup tup tup.
Oups ! Je ne l'ai pas trouvé. Bon, c'est pas grave, il y a sur le ouebe des sites très bien faits qui traitent de la question, notamment un qui envoie dans les cordes les charlatans et attrape-gogos qui bernent le pauvre monde en lui faisant croire qu'on peut contourner les règles du hasard en misant sur les numéros « en forme » ou en examinant à la loupe les « écarts », « groupements », « suites », « fréquence de sortie en fonction de la conjonction Pluton-Balance » et autres billevesées, toujours accompagnées du mot magique (probabilités) et dont les escrocs qui en sont auteurs n'ignorent rien de l'ineptie mais préfèrent quand même au calcul des probas celui de l'argent qu'ils extorquent aux naïfs. Tiens ! Voici le lien en question : http://charlatans.free.fr/proba.shtml
Tas de sable. --->
Mais on s'éloigne du sujet !
Il s'avère que le rapido, pourtant un des jeux les plus rentables pour les joueurs parmi ceux que propose la « française » ne leur rapporte qu'environ les deux tiers de leurs mises. Rien à voir avec les 97 % qu'offrent les casinos ! Bien sûr, il faut payer l'impression des bulletins, l'installation des écrans, les intermédiaires, la pub, le buraliste, la …asse qui commente les résultats sur le petit écran (ça c'est pour le loto ou le keno – le rapido publie ses résultats d'une manière très impersonnelle en montrant simplement les nombres sortis, sans s'assurer le recours d'une … décolorée.)
Le loto, le keno, et les jeux du même type sont certes malhonnêtes dans la mesure où ils proposent une rentabilité très inférieure à celle des casinos. Mais la manière de jouer est très différente ; au loto on remplit un bulletin, ou plusieurs, on se poste devant la télé au moment du tirage et à la fin de l'émission, soit on téléphone à son patron pour lui signifier qu'il est un gros con, soit on froisse le bulletin dans sa paume en se lamentant : « Encore perdu ! » ou « juste remboursé » en attendant la prochaine fois.
Avec le rapido, les bistrots deviennent des endroits où on constate chez les clients les mêmes comportements compulsifs que dans les salles de jeu. Puisqu'un tirage (en fait 2) y a lieu toutes les 5 minutes. A une fréquence semblable à celle des tirages de roulette. Mais avec une « ruine » beaucoup plus rapide. En un après-midi il est très facile de laisser la moitié de sa paye ! (Nous ne traiterons pas ici des jeux de grattage, beaucoup plus difficiles à étudier car on ne dispose pas des données qui les régissent, mais tout aussi pernicieux !)
Voilà pourquoi j'ai décidé d'inventer une méthode qui fera de vous un gagnant du rapido. C'est d'une simplicité biblique !
Et c'est votre récompense pour avoir été aussi loin dans la lecture de cette chronique. Oui, pour un texte consacré au rapido, l'arrivée à l'endroit le plus intéressant n'est pas trop… rapide !
Il suffit, comment se fait-il que personne n'y ait pensé plus tôt ?, de se placer du côté de la banque, c'est à dire de la française des jeux.
Voici la façon de procéder :
Remplir un bulletin en choisissant 8 numéros. Au hasard, ou en faisant appel aux dates de naissance de ses proches, à son code de carte bleue, à l'astrologie, la numérologie, le feng yi, la technique de méditation des moines Za, aucune importance !
Et, surtout ! Ne pas miser ! Déposer le prix d'une grille dans un porte-monnaie.
Et se contenter de suivre sur l'écran les évolutions des boulettes qui atterrissent dans les cases. Et à chaque fois que les numéros ne sont pas sortis, se dire qu'on a gagné sa mise.
Après quelques heures passées à s'occuper ainsi, on aura, sauf accident (improbable mais quand même possible – tout jeu comporte un risque !), amassé un beau magot. Et on pourra se payer la blanquette de veau, la choucroute au Riesling, le coq au vin qui figurent au menu. Et une bouteille de Côtes du Rhône, et un digestif !
Attention ! Cette méthode est très différente de l'attitude qu'adoptent certains joueurs potentiels du tiercé ou du loto qui se disent, après avoir raté volontairement ou non la validation de leur bulletin, et sans avoir choisi leurs chevaux ou leurs numéros : « j'ai économisé tant d'euros ! » (la somme qu'ils auraient misée s'ils avaient participé). Non ! Ce qui vous est proposé ici est une vraie façon de jouer, avec frissons, angoisse, tremblements, excitation, désespoir, soulagement… En profitant gratuitement de toute l'infrastructure mise en place par la française des jeux.
Car celui qui ne participe pas au jeu n'a évidemment pas « gagné » le montant de sa mise, puisqu'il aurait pu miser sur le bon canasson ou les bons chiffres et sa non-participation représenterait dans ce cas un « manque à gagner ».
Voulez-vous essayer ? Je ne promets pas le remboursement du manque à gagner éventuel subit par la sortie des 8 bons numéros. Mais je suis prêt à parier que cette méthode m'assurera un taux de satisfaction de 67% environ (ce sont les règles des probabilités qui décident, pas moi !) *
Essayez !
L'inconvénient de cette méthode, il y en a un et je me dois de le mentionner pour rester honnête, c'est que le type d'émotions qu'il procure n'est pas de ceux que connaissent les joueurs. Eh oui ! La « banque » est certaine de gagner à long terme, mais elle joue « gagne petit ». Elle se réjouit en continu des petites sommes qu'elle engrange et pousse un cri d'effroi lorsqu'elle doit lâcher d'un seul coup une grosse somme au joueur chanceux. Du moins elle le ferait si elle avait une âme ! Ceux qui adopteront ma méthode seront soumis à la même règle : les émotions fortes qu'ils ressentiront ne pourront qu'être négatives. Mais si, par malheur, leurs numéros sortent, ils ne tarderont pas à se « refaire ».
Il y a, c'est vrai, un autre inconvénient, mais dans le SEUL jeu existant où les probabilités sont du côté du joueur, ça me semble admissible : Au tout début du jeu, ou si on bénéficie d'une chance (ou plutôt d'une malchance, vous suivez ?) exceptionnelle, le porte-monnaie risque d'être vide, et même débiteur. La somme qu'il contient peut s'avérer négative. Dans ce cas, il est nécessaire de matérialiser cette situation en y déposant un papier, une espèce de reconnaissance de dette, indiquant la somme qu'on doit au porte-monnaie. Et tant pis pour le coq au vin, la choucroute au Riesling ; on attendra des jours meilleurs pour se les offrir ! On peut alors changer de tactique et doubler, tripler ou quadrupler ses mises. Pour se refaire plus rapidement. Car dans cette position qu'on occupe en étant du côté de la banque, et où les règles sont inversées, plus on joue et plus on gagne, autrement dit plus on s'éloigne du syndrome de la « ruine du joueur ». En agissant de la sorte on est certain de récupérer ses pertes après un temps plus ou moins long. Au bout d'une période infinie, mais inutile d'aller jusque là car la vie est courte, disons en quelques jours, semaines, mois, années, on rentrera dans ses sous. C'est inéluctable !
Si l'on pratiquait cette stratégie pertinente au casino les effets positifs pourraient tarder à se faire sentir ; mais en l'appliquant à un jeu aussi peu rentable que le rapido (à deux tiers contre un) on constatera très rapidement que l'escarcelle se remplit.
Essayez quand même ! Et envoyez-moi vos impressions.
Quand tout le monde aura compris que cette méthode est la seule qui soit valable, la française des jeux sera à genoux, tout le monde sera riche, et…
Et il me faudra trouver une autre idée géniale !
* En fait sur un seul tirage et en supposant que la satisfaction ou l'insatisfaction sont proportionnelles respectivement au gain et à la perte. Pour un nombre de tirages tendant vers l'infini, l'indice de satisfaction atteint les 100 %.